The Black Keys - Attack & Release

Publié le par Clément

Voici un groupe de blues-rThe Black Keys - Attack & Releaseock américain formé en 2001, composé de Dan Auerbach (guitare et chant) et Patrick Carney (batterie), tous deux originaires de l'Ohio, et qui s'est fait connaître avec le disque Thickfreakness sorti en 2003. Après le succès commercial mondial que leur a apporté ce disque, que devient le duo? Cinq ans et trois albums plus tard, The Black Keys nous présentent Attack & Release, leur dernier bébé.

Première piste, premier aperçu de l'oeuvre qui en dit souvent long sur l'artiste mais qui bluffe régulièrement avec la suite de l'album. All You Ever Wanted ne va pas à l'encontre de ce principe : ce morceau calme, lent est apaisant et reposant de par les multiples delay exploités sur la guitare. Il contraste bien sûr avec le reste de l'oeuvre, plus pêchu, mais représente néanmoins une fenêtre ouverte sur le fond de l'âme créatrice et inspiratrice des deux hommes. On y retrouve une touche importante de blues, un léger esprit country marqué par l'accent presque southern american de Dan Auerbach (sa voix nasillarde par moments et sa décontraction dans l'oralisation de certaines syllabes me poussent vers cette analyse, bien qu'assez éxagérée ) dont le style physique sur la jaquette du disque n'est pas sans rappeler vaguement le trio barbu de ZZ Top, lui vraiment originaire du sud du pays, le Texas.

Mais si cette piste est une introduction à l'album, l'entrée en matière de celui-ci ne se fait pour autant pas lors de la deuxième piste. Du moins, pas entièrement. La deuxième partie de la première piste va déjà plus en profondeur et gagne en lourdeur en effet, le subterfuge n'aura pas duré. The Black Keys nous donnent un aperçu de la puissance qu'ils vont développer dans le reste de l'oeuvre dès le morceau d'introduction, sans pour autant accélérer le rythme de jeu, et ce bien que celui-ci se soit voulu marqué dans un certain décalage.

I Got Mine
tranche avec la première piste et Strange Times lui emboîte le pas. Ca y est, la couleur est clairement annoncée et le parallèle qui suscite le plus de réactions (positives comme négatives) peut enfin être tracé : parallèle entre le groupe et The White Stripes, la paire 'rivale' si l'on peut s'exprimer ainsi, aux inspirations proches et à la date d'émergence identique à quelques mois près (2003, date de sortie de Elephant pour le binôme White et de Thickfreakness pour le duo de l'Ohio).

Le style est ici épuré et très rythmé. Le troisième quart de la piste 2 rappelle vaguement la lancinance de la piste d'introduction. Il y a de la cohérence dans ce travail. La piste 3 fait quant à elle preuve de plus de puissance encore, j'en veux pour preuve l'utilisation du tom basse pour marquer la rythmique de la batterie. On est loin de la légèreté d'un hit-hat ou d'une ride. L'enchevêtrement de la rythmique du refrain et du riff guitare du couplet sur le dernier quart du morceau est très convaincant de son côté, une vraie preuve de flexibilité dans la création.

Docteur Jekyll et Mister Hyde, ou Remember When side A et Remember When side B. Le thème de la dualité dans l'album trouve très sûrement son origine dans la composition du groupe (deux membres). Mais est-ce ici un double de type miroir, comme le double '1' correspondant au nombre de pistes dans le disque (11)? Plutôt une franche opposition de formes.

On passe ici de la plénitude, tranquillité, calme de la piste 6 incarnés par ces mélodies d'arrière plan à la guitare et par leur long sustain, à l'aggressivité pure du morceau suivant (sûrement le plus sec de l'oeuvre). De la volupté des nuages au feu des enfers sans passer par la terre ferme ; autant dire que la transition est rude mais elle a le mérite d'optimiser l'effet de puissance de la side B, tout comme sa durée éclair (2'10) qui en fait la piste la plus courte de l'album. De la pêche, du drive, une batterie rapide et épuré : on a une pépite de rock brut entre les mains. Cette side B est le Blitzkrieg de Attack & Release qui suit la Drôle de guerre menée dans la side A.

La piste la plus longue conclut l'oeuvre de la même façon qu'elle a été commencée : dans le calme et la plénitude. La lancinance de Things Ain't Like They Used To Be associée à ses sons électroniques au sustain infini (que l'on retrouve parsemés discrètement aux quatres coins du disque) a un petit quelque chose du géant Pink Floyd ou encore plus particulièrement de Child in Time de Deep Purple. Rapprochement à manipuler avec des pincettes évidemment. Quoi qu'il en soit, le parallèle souvent établi avec The White Stripes trouve ici (entre autres) ses frontières.

The Black Keys
nous livrent donc un savant mélange de saveurs avec Attack & Release, saveurs qui savent s'accorder ou s'opposer catégoriquement, mais qui tirent toujours le meilleur les unes des autres. Du blues, et encore du blues, mais du drive et du rythme pour un résultat clair et épuré à la manière du duo Jack et Meg White, mais avec plus de rondeur et donc une sensation de travail mieux fini, moins bâclé. La boucle est bouclée. Des phases pêchues oui, mais une ambiance générale très apaisante. Ce sont les instruments exotiques tels que le banjo dans l'introduction de Psychotic Girl ou la flute dans Same Old Thing qui sont généralement vecteurs d'une telle tranquillité. Oceans and Streams est sûrement le morceau le plus représentatif du disque : du drive mais au service de la simplicité et de la douceur, un savant mélange que l'on retrouve dans le titre de la piste, alliant le calme de l'océan à la vigueur des courants. L'album est là.

L'oeuvre laisse enfin un sentiment d'accomplissement et de clarté, mais, malgré tout, une vague impression de déjà entendu parvient parfois à se frayer un chemin dans nos oreilles au fil de l'écoute, particulièrement dans les passages lents de l'album, mais aussi de manière générale. Néanmoins, l'efficacité irréprochable des différentes pistes prend amplement le dessus sur cette impression éphémère et, arrivé au crépuscule de l'oeuvre, une seule envie se fait réellement sentir : l'écouter à nouveau.


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